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Célébration du Jour de la Terre : où en sommes-nous dans la transition énergétique?

 Myriam Lévesque 

Pour de nombreuses personnes, plus particulièrement les jeunes, le 22 avril est une journée d’une grande importance. En effet, le Jour de la Terre symbolise l’action citoyenne pour l’environnement et prône l’innovation énergétique. Que ce soit par la collecte de déchets, par la plantation d’arbres ou par la participation à une manifestation, c’est environ un milliard de personnes qui célèbrent le Jour de la Terre chaque année par la prise d’action. Bien que la préservation environnementale représente de plus en plus une priorité pour notre gouvernement, notre société québécoise a, encore aujourd’hui, des défis énergétiques considérables à relever.  

D’où vient le Jour de la Terre? 

La participation citoyenne résultant en la création du Jour de la Terre est l’initiative de deux américains prénommés Gaylord Nelson et  Denis Hayes. Leurs objectifs initiaux consistaient à magnifier l’environnement ainsi qu’à encourager le peuple américain à prendre part à la lutte contre les industries polluantes. La date du 22 avril est retenue pour sa concordance avec le dévoilement de la première photo de Gaïa, capturée de l’espace. De plus, cette journée représente une prise de conscience générale de la population face à une disponibilité restreinte des ressources naturelles que nous exploitons quotidiennement. Depuis 1970, le Jour de la Terre vise à sensibiliser les citoyens au sujet de la protection de l’environnement, en plus d’encourager les gens à agir de manière concrète, peu importe la portée du geste réalisé. Avec le Jour de la Terre vient la question de la transition énergétique, essentielle dans la lutte contre les changements climatiques. 

La transition énergétique : un questionnement sociétal? 

La transition énergétique n’est pas une mince affaire. D’importants changements à notre mode de production énergétique actuel de même qu’une vaste campagne de conscientisation devront être réalisés afin d’atteindre l’objectif que s’est fixé le gouvernement québécois. En réponse à l’accélération des changements climatiques, ce dernier souhaite devenir carboneutre d’ici 2050. Pour ce faire, le Québec devra, à coup sûr, prendre un virage décisif. Très prochainement, notre société devra se pencher sur l’avenir énergétique de notre province et façonner sa propre vision environnementale. Plusieurs questionnements demeurent. Par exemple, entamerons-nous une transition énergétique tout en conservant le même modèle économique? Quelles conséquences aura la carboneutralité; devrons-nous polluer pour ne plus polluer? Notre plan énergétique sera-t-il réalisé en concertation avec les communautés autochtones du Québec? Eh bien, c’est à nous, de même qu’aux générations futures, que reviendra la responsabilité d’en décider.   

Quoi que nous fassions, il est impératif de le faire maintenant, car les cibles fixées par le gouvernement sont à plusieurs années-lumière de la réalité énergétique que nous connaissons. 

L’ampleur de la transition énergétique québécoise 

De manière plus concrète, l’analyse de la « tarte énergétique » du Québec est un excellent indicateur de la situation énergétique actuelle. Cette fameuse tarte est répartie en trois pointes inégales. Pour commencer, près de la moitié de celle-ci représente les hydrocarbures tels que le pétrole, le gaz naturel et le charbon. C’est une donnée tout de même peu encourageante pour l’atteinte de la carboneutralité dans 26 ans, surtout lorsqu’on considère notre dépendance marquée envers ces ressources naturelles. Quant à elle, sa pointe jumelle, l’hydroélectricité et l’éolien, sont présentement en demande croissante et ne seront bientôt plus en mesure de répondre à la demande. Finalement, la dernière pointe de ce dessert métaphorique représente la biomasse. Encore à ce jour, les trois domaines les plus énergivores sont le domaine des transports, l’industrie de production ainsi que le domaine du bâtiment. 

Pour arriver à la carboneutralité d’ici 2050, l’utilisation des hydrocarbures devra être complètement éliminée. Pour ce faire, le gouvernement propose d’augmenter la production d’hydroélectricité. Selon les estimations réalisées par ce dernier, il faudrait produire environ 100 térawatts-heures d’électricité supplémentaire pour répondre à nos besoins. Ce nombre peut sembler assez anodin, cependant, ce dernier représente près de la moitié de notre production électrique actuelle. C’est énorme! En outre, il serait nécessaire d’accroître le nombre de parcs éoliens pour répondre à cet objectif. D’autant plus que nos besoins énergétiques ne cessent de croître avec l’augmentation de la population. Pour donner un ordre de grandeur, le barrage de la Romaine 4, situé sur la Côte-Nord, produit 8 Twh chaque année. La construction de cette imposante infrastructure a d’ailleurs coûté 7,2 milliards de dollars aux contribuables à l’époque. La transition énergétique demandera certainement des investissements colossaux si la société québécoise décide d’aller dans ce sens.  

L’efficacité énergétique fait également partie du débat sur la transition énergétique. Il est évident que nous devrons, en tant que société, faire face à notre consommation démesurée. Sans de tels efforts, la transition énergétique sera irréalisable, aujourd’hui comme dans 50 ans. Toutefois, l’innovation technologique constitue une bonne option pour répondre à  ce défi environnemental. 

Le projet Northvolt… 

Le projet Northvolt, d’abord présenté comme un projet clé dans la lutte contre les changements climatiques, semble avoir été mêlé à la controverse sur plusieurs points.  

L’objectif premier de ce programme consistait à produire des batteries au lithium, et ce, au Québec. Quoi de mieux pour stimuler l’économie québécoise et devenir un leader en matière de transition énergétique ? Néanmoins, ce projet « révolutionnaire » implique l’abattage de milliers d’arbres et la destruction de 61 milieux humides sur 92, soit plus du deux tiers des milieux marécageux présents sur le site. De plus, plusieurs espèces d’oiseaux seront influencées par cette perturbation humaine qui affectera grandement la biodiversité de la Montérégie. La protection de 76 hectares de milieux naturels est jugée insuffisante par bon nombre de spécialistes. Dans un autre ordre d’idées, plusieurs chercheurs canadiens effectuent des avancées en matière de batteries à base de soufre, de sodium et d’électrolyte solide. Y a-t-il encore de l’avenir dans le lithium? 

Certes, ce projet demeure tout de même intéressant par son centre de recyclage de batteries et par la possibilité de contribuer à la production de plus d’un million de voitures électriques.  

L’avenir de la voiture à hydrogène vert, quant à elle, semble plutôt incertain par le boudage collectif et par le manque d’offre à cet égard chez les concessionnaires. À suivre… 

Bref, la société québécoise doit absolument se pencher sur la transition énergétique en cours. Malgré les nombreuses nuances émises dans cet article, je demeure particulièrement fière du gouvernement québécois pour s’être fixé des objectifs environnementaux de cette ampleur. Cependant, je crois qu’il est capital d’exprimer votre propre avis en la matière, car la controverse entourant le projet Northvolt est un signe clair et précis que ce ne sont pas tous les Québécois qui sont en accord avec la vision énergétique prise par le gouvernement actuel. Il est dorénavant impossible de maintenir le statu quo en pensant que notre opinion personnelle et notre pouvoir d’action sont vains et impuissants. Il est temps pour le Québec de se plonger dans un débat sociétal complexe, mais pour le moins pressant et nécessaire.  

BIBLIOGRAPHIE 

Article de journal extrait d’un site Web 

GOSSELIN, Francis. « Northvolt: de l’improvisation économique », Journal de  

Montréal (10 février 2024), [https://www.journaldemontreal.com/2024/02/10/northvolt–de-limprovisation-economique], page consultée le 21 mars 2024. 

LÉVEILLÉ, Jean-Thomas. « Projet d’usine en Montérégie », La Presse (17 février  

2024), [https://www.lapresse.ca/actualites/environnement/2024-02-17/projet-d-usine-en-monteregie/le-terrain-de-northvolt-sous-la-loupe.php#:~:text=Au%20total%2C%20le%20projet%20de,arborescents%20et%20des%20mar%C3%A9cages%20arbustifs.], page consultée le 21 mars 2024. 

Documentaire 

Laurin, Vincent. Le Québec accro à l’énergie?, Carbone, Canada, 2023, 13 minutes.  

Site Internet 

GANEM, Rachel. Le Jour de la Terre, c’est quoi ?, 

https://jourdelaterre.org/fr/blog/2017/04/22/le-jour-de-la-terre-cest-quoi/, page consultée le 20 mars 2024. 

Faudra-t-il un jour réinventer notre économie?

En 2022, de nombreux États comme le Québec et le Canada s’engagent dans la course quotidienne vers la hausse du PIB. Maintenant que la terre se retrouve dans l’incapacité de répondre à nos habitudes de consommation, il sera nécessaire de repenser le capitalisme. Nos objectifs ultimes de croissance économique n’auront d’autres choix que d’être revisités dans un contexte de pénurie des ressources.

Le capitalisme, doctrine économique dominante dans ce monde, se fonde sur l’accumulation de capitaux à travers une production de masse, et se caractérise par le désir de s’enrichir toujours plus. Ce système voit le jour en Angleterre, vers la fin du XVIII siècle alors que la population mondiale ne dépassait pas les 800 millions de personnes. Aujourd’hui, elle s’élève à près de 8 milliards. Dans un cadre de surpopulation, il est normal de se demander si cette volonté de croissance perpétuelle est toujours légitime, car la recherche constante du profit encourage le phénomène de surconsommation. Depuis l’aire de la production de masse, l’homme ne s’est vu imposer aucune limite quant à la production de biens. Or, la “bio-disponibilité” figurera comme le principal frein à l’accumulation de capitaux, l’essence même du capitalisme.

Le 28 juillet 2022 désignait le jour du dépassement des ressources énergétiques renouvelables. Ce qui signifie que nous avions dépassé la biocapacité de la terre (capacité de la terre à se régénérer et à absorber les déchets produits par l’Homme, notamment la séquestration du CO2). De nos jours, l’humanité aurait besoin 1,75 planète pour régénérer ce qu’elle consomme. Les divers écosystèmes (prairies, zones humides, forêts) deviennent chaque jour de plus en plus vulnérables. De plus, l’abattage des forêts et l’exploitation des énergies fossiles constituent les principales causes du réchauffement climatique qui contribue par la suite à accentuer les feux de forêts, et perturbe la vie des planctons, entraînant l’acidification des océans, et diminuant l’oxygénation des zones marines.

Ainsi, la décroissance volontaire devient un pilier pour contrer l’exponentiation de l’empreinte écologique due à la surpopulation. Aujourd’hui, en prenant pour point de départ l’estimation des Nations unies publiée en décembre 2020 qui soulignait que pour atteindre l’objectif de réchauffement de l’accord de Paris, il faudrait réduire les émissions de gaz à effet de serre de 7,6 % par an de 2020 à 2030. Comme l’avait prédit Jean-Marc Jancovici, ingénieur expert en énergie et climat, pour respecter la limite souhaitée d’un réchauffement au-dessus de 2°C, lue comme 1,5°C, la quantité d’émissions de gaz devait être divisée par trois d’ici 2050. Ce qui signifie 5% de réduction par an pendant les 30 prochaines années. « En d’autres termes, nous aurons besoin de plus de COVID-19 chaque année pendant 30 ans pour atteindre les objectifs de l’accord de Paris», a-t-il expliqué.

Advenant le cas où l’humanité tourne le dos à la décroissance volontaire, il est envisagé que celle-ci soit tout de même un passage obligé dans l’histoire. Autrement dit, si nous n’effectuons aucun changement dans notre vitesse de production et dans nos habitudes de consommation, la nature se chargera de nous en imposer. Un scénario de référence prévoit une augmentation de la température de 2°C d’ici 2050 et de 3°C d’ici 2100 en l’absence de mesures d’atténuation. Sur la base des projections de l’ONU, avec une

population dépassant les 10 milliards d’individus, le taux d’augmentation d’utilisation des combustibles fossiles aura un impact négatif dominant, réduisant le PIB mondial de 21% d’ici 2100. De cette façon, l’humanité sera contrainte de revoir ses paradigmes quant à sa façon d’exploiter les ressources.

Finalement, il est clair que la philosophie actuelle d’accumulation contribue à la dégradation des divers écosystèmes. On estime à plus de 6.6000 milliards le coût des dégâts environnementaux causés par l’homme. Il faut des milliers et des milliers d’années au lion pour s’élever au-dessus de la chaîne alimentaire, ce qui laisse le temps aux autres espèces d’évoluer, à la gazelle de courir plus vite. À l’opposée, l’ascension de l’Homme au sommet de la chaîne alimentaire fut si rapide que l’écosystème n’eut aucune chance de s’adapter. Saurons-nous changer pour sauver la planète qui comble jusqu’à présent nos besoins?