UN CERVEAU EN SANTÉ

Le cerveau, cet ordinateur biologique qui nous permet de comprendre le monde qui nous entoure est , à bien des égards, mystérieux. Bien que dans le dernier siècle, les avancées scientifiques dans le domaine de la neurologie ont été importantes, beaucoup reste à découvrir.

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La neurologie en bref

La neurologie est l’étude des maladies du système nerveux. Ce dernier est divisé en deux hémisphères: le système nerveux central, composé de l’encéphale et de la moelle épinière et le système nerveux périphérique qui inclut le système nerveux sympathique (les ganglions, amas de corps cellulaires de neurones et la glande surrénale) et les nerfs qui s’étendent dans l’entièreté du corps humain. Sa pratique, sous sa forme la plus primitive, débute dans la préhistoire. En effet, des traces de trépanation, l’opération qui consiste à créer une ouverture circulaire dans le crâne afin de diminuer la pression intracrânienne, ont été retrouvées sur des humains et des animaux qui auraient vécu au mésolithique. Bien qu’il est supposé que certaines de ces opérations étaient purement symboliques ou utilisées pour tenter de traiter des maux comme l’épilepsie (contre lesquels elle est inefficace), les taux de survie de l’opération sont surprenamment élevés, jusqu’à 70% dans certains cas. On retrouve des descriptions anatomiques du système nerveux dans des papyrus égyptiens et de nombreux écrits grecs et romains. C’est toutefois pendant la renaissance que l’intérêt pour cette branche des sciences médicales entre en ébullition avec les premières gravures et dessins complets des nerfs et du cerveau, ainsi que les premières études des cellules nerveuses. Tout cela grâce à l’invention du microscope, qui amène la compréhension de la neurologie à des niveaux sans précédents. Malheureusement, ce développement se fait au dépend de beaucoup de patients, particulièrement ceux atteints de déficiences et de maladies mentales qui deviennent les cobayes d’une variété de procédures plus cruelles les unes que les autres, comme la lobotomie ou les électrochocs, censés les guérir. Après de nombreuses erreurs et une certaine quantité d’atrocités, la neurologie atteint son stade moderne lors de la deuxième moitié du 20e siècle et occupe une place importante dans les recherches scientifiques, notamment les études sur les cancers et les maladies dégénératives. Le cerveau étant relié directement ou indirectement à tous les organes et tissus du corps humain, nombreux sont les facteurs qui influencent sa santé et l’étude de cette dernière

Perte de poids, gain de cerveau

Une étude récente, publiée le 1er octobre 2022 dans la revue Neurolmage, se penche sur les liens entre la masse corporelle et la santé cérébrale, particulièrement sur des patients ayant bénéficié d’une chirurgie bariatrique réduisant la capacité de leur estomac et leur appétit. Sous la direction de Andréanne Michaud, professeure à l’école de nutrition de l’université Laval, 87 individus souffrant d’obésité et ayant participé à la chirurgie ont été observés au début de l’étude et, après une période de 24 mois, 34 étaient encore sous observation. Les résultats obtenus sont fascinants. Depuis plusieurs années il est possible, avec une relative précision, de mesurer la santé de l’encéphale à l’aide d’une mesure appelée âge cérébral, ou la différence entre la densité que devrait avoir la matière grise du cerveau à un âge donné et son état réel, appelé delta âge. Généralement, un cerveau plus âgé ou moins en santé pour une quelconque raison, tels les problèmes cardiométaboliques causés par l’obésité, présente des signes d’atrophie de la matière grise et une densité moindre.

Cette mesure est souvent utilisée dans de telles études, car elle est à la fois facile à mesurer et à quantifier, grâce à l’IRM (Imagerie par Résonance Magnétique) et est bien représentative de l’état général du cerveau. Les personnes ayant un âge cérébral plus élevé présentent des chances accrues de maladies neurologiques et de déficience cognitive. C’est cette mesure qui a été utilisée afin d’analyser le progrès des patients, comme le démontre ce diagramme:

Les progrès observés sont indiscutables. En effet, après 12 mois de suivi, l’âge cérébral avait reculé de 2,9 ans en moyenne puis, un an plus tard, d’un total de 5,6 ans. Le changement observé était aussi proportionnel à la diminution de poids. Cependant, ce n’est pas immédiat. Dans les 4 mois après l’intervention, aucune modification concluante n’a été constatée. De réels résultats sont apparus clairement entre 8 et 12 mois suivant la chirurgie. Ces changements sont associés à une amélioration généralisée de plusieurs facteurs métaboliques, la diminution de la pression sanguine et une baisse de la résistance à l’insuline souvent développée par les obèses.

Une analyse imparfaite

Il est impératif de prendre en compte que cette étude, comme tant d’autres, démontre une corrélation entre la perte de poids et la restauration de la matière grise et non une causalité. Les chercheurs eux-mêmes sont parfaitement conscients du fait que l’obésité elle-même est non seulement causée par une variété de facteurs, mais influence pratiquement tous les organes du corps qui peuvent à leur tour affecter le cerveau, les liens les unissant étant incroyablement complexes. De plus, plusieurs aspects de la vie des patients à l’étude ne pouvaient pas être contrôlés ou observés par les chercheurs, tels l’activité physique, la consommation d’alcool et de drogues ou l’alimentation. Cela ne veut pas dire que perdre beaucoup de poids rapidement est toujours bénéfique au corps humain. En effet, il existe des mécanismes biologiques visant à assurer la survie, qui font en sorte qu’un changement drastique sera souvent rapidement annulé, le corps tentant de revenir à son état initial à cause du danger perçu. Chaque individu a aussi un poids idéal différent et bien que l’IMC (Indice de Masse Corporelle) utilisé dans le rapport soit généralement un bon indicateur, il ne s’applique pas également à tous. La chirurgie bariatrique est aussi un dernier recours, les bonnes habitudes d’alimentation et l’activité physique régulière étant préférables à bien des égards. En conclusion, selon les résultats de cette étude, le vieillissement rapide du cerveau causé par l’obésité est réversible à condition que l’individu affecté perde du poids de façon permanente, en plus de travailler à l’amélioration générale de ses habitudes de vie.

BIBLIOGRAPHIE

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TANGUAY, Sébastien. «Qui perd du poids gagne en matière grise», Le Devoir (6 octobre 2022), [https://www.ledevoir.com/societe/science/761777/science-qui-perd-du-poids-gagne-en-matiere-grise], page consultée le 4 novembre 2022

WIKIPEDIA, «Chirurgie Bariatrique», (2022), [https://fr.wikipedia.org/wiki/Chirurgie_bariatrique], page consultée le 4 novembre 2022

ZEIGHAMI, Yashar et Andréanne MICHAUD. «Impact of weight loss on brain age: Improved brain health following bariatric surgery», Neurolmage (1 octobre 2022), [https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1053811922005328?via%3Dihub], page consultée le 1 novembre 2022

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