Myriam Lévesque
Le roi ordonna qu’on les apporte à l’océan pour prendre un navire vers le nord. -N’étiez-vous pas au courant ?
Tous sursautèrent lorsqu’ils entendirent un son strident à quelques mètres d’eux : Adélaïde s’était défaite de son étreinte pour s’effondrer au sol.
C’est grâce au mouvement soudain d’Adélaïde que Laurent prit conscience du défi qui se trouvait devant eux. Ils avaient parcouru tout ce chemin dans le but de sauver le peuple d’Adélaïde, ce peuple devenant petit à petit le peuple de Laurent. Cependant, son vaurien de père avait eu l’abominable idée de les envoyer dans un royaume allié, au Royaume des Quatre, formé suite à une alliance entre quatre nations. Ce royaume était en quelque sorte le berceau d’un empire riche et puissant. Laurent, de nouveau songeur, retomba dans ses pensées. Ce phénomène arrivait souvent chez le garçon : c’était pourtant la première fois que des pensées comme celles-là défilaient dans sa tête, comme si quelqu’un de l’extérieur lui racontait sa propre histoire d’un point de vue nettement différent de celui de son paternel.
Telle la plus grande déception qu’un fils pouvait infliger à son père, Laurent n’avait jamais été intéressé par le trône du roi Conor. Le garçon préférait consacrer sa position favorable à d’autres activités: il s’adressait constamment à la population, reflétant l’importance qu’il accordait au bien-être de sa nation. Nous, les gens du village, le voyions certainement comme un meneur pacifique en temps de crise. Le prince Byrne n’était certainement pas un guerrier, mais son courage, son écoute, son dévouement, sa présence, son amabilité ainsi que sa serviabilité en faisaient un garçon de principes. C’est vraisemblablement la raison pour laquelle il n’aimait pas faire la guerre, détestait faire la capture et haïssait la fête et les réjouissances qui s’ensuivaient habituellement. Principe qu’il partageait avec sa belle Adélaïde. Et son nouveau village rempli de bonté.
Ces pensées lui donnèrent la force d’avancer; il savait qu’il devrait agir vite s’il souhaitait retrouver les femmes disparues. Bien que le garçon n’ait aucun plan sous la main, une idée venait de germer dans sa tête. Il se lança sans plus attendre:
— Qu’est-ce que vous attendez? dit-il d’une voix autoritaire. Venez-la chercher et flanquez-la au cachot! Cette garce essaie de se libérer, elle n’attend qu’une occasion lui permettant de s’enfuir.
Laurent alla jusqu’à laisser tomber un crachat tout juste à côté d’Adélaïde. Aussitôt, un des deux gardes présents empoigna la demoiselle et la conduisit à l’intérieur de l’immense bâtisse se dressant devant eux. Le jeune garçon prit de nouveau la parole, cette fois-ci pour faire passer un interrogatoire à l’autre garde avec des questions dissimulant des intentions cachées:
–Puis-je connaître votre nom s’il vous plaît? dit Laurent d’une voix aimable.
–Mon nom est Jean Larochelle.
–Puis-je savoir où est le roi Conor?
–Sa Majesté a décidé de prendre la journée pour rendre visite à son ami Marius, dans le royaume voisin. dit le garde calmement.
–Je vous remercie infiniment pour ces informations et votre bon service, Larochelle. Puisque vous êtes un garde loyal, je vous demande deux faveurs.
–Je vous écoute, Prince Laurent!
Jean Larochelle était si fier de se voir confier non seulement une tâche, mais deux par le Prince Laurent!
–Je vous charge de rejoindre le roi chez Marius pour lui faire un message.
–Quel est le message à lui transmettre?
–Dites à mon père que j’ai fait ce qu’il attendait de moi. La demoiselle Adélaïde est capturée et se trouve en ce moment même au cachot du Royaume.
–C’est noté. Quelle est la deuxième tâche qui m’est attribuée?
–Fournissez-moi une charrette sur-le-champ, ou du moins le plus tôt possible, ici-même.
–Puis-je connaître la raison de cette demande Votre Altesse?
Le garde se rendit aussitôt compte de l’absurdité de sa question, vu son statut. Il ajouta nerveusement:
–Toutes mes excuses eeeeh, Prince Laurent, eeeeh je ne sais point ce qui m’a pris.
–Vous êtes pardonné, Larochelle. Maintenant, occupez-vous de ma deuxième demande en priorité, la première ensuite.
–Je m’y mets de ce pas, Votre Majesté.
Le garde disparut du champ de vision de Laurent et ce dernier attendit impatiemment la venue de sa charrette.
Une trentaine de minutes plus tard, assis paisiblement dans sa charrette, Laurent se dirigeait tranquillement vers MILLELIEUXDEMOILOU. Son plan s’était maintenant concrétisé, du moins en partie. En envoyant Larochelle livrer son message pour l’informer de l’emprisonnement d’Adélaïde, son père le croirait toujours loyal à son royaume. Cependant, Laurent n’avait toujours pas changé d’avis. Il s’associait dorénavant avec le village d’Alix et ses guerrières. Toutefois, les actions du prince permettraient certainement de flouer le roi… Laurent comptait retrouver Alix et son groupe de femmes combattantes, survivantes de l’attaque, pour élaborer un plan. Il pensa ramener les femmes du village au royaume de son père. Ces dernières prétendraient être prisonnières du Prince Laurent et on les emmènerait au port où on les déporteraient au royaume des Quatre, comme les autres prisonnières de MILLELIEUXDEMOILOU. Une fois arrivées, les dames attaqueraient la prison du royaume, de la même manière qu’elles avaient su le faire lorsque les hommes de leur village combattaient de leur côté. Laurent pensait de plus en plus à son plan, ayant de plus en plus envie de le partager à ses nouvelles amies. Il était d’ailleurs sur le point d’arriver au village quand…
À suivre…









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