L’apparition

Rose-Marie Cantin 

Le 1er décembre, jour final de la semaine d’école, lorsque les élèves et les enseignants arrivèrent à l’école au matin, une chose était apparue. Elle était apparue plus précisément au milieu de la scène de l’Agora du PMV. Qui l’avait placée ainsi? La question courait sur toutes les lèvres, autant celles des élèves que celles des enseignants. Les rumeurs couraient plus vite encore qu’un cheval de compétition. C’était assurément un concierge, disait l’un, mais non, un professeur de sciences qui s’emmerde, disait l’autre. Une chose était certaine, l’apparition n’avait pas sa place dans l’agora et fut immédiatement emmenée au secrétariat du PMV.  

Tout le monde pensait l’incident clos, il devait l’être, la chose avait été soustraite à la vue de tous. L’événement intéressant de la journée était fini. 

Le 2 décembre, un samedi, les élèves et les professeurs avaient tous oublié l’incident de la veille, en s’abandonnant à la fin de semaine. Une fin de semaine de correction pour certains, de travail pour d’autres ou encore de relaxation pour les plus chanceux ou procrastinateurs. Sans que la moindre âme qui vive ne le sache, une deuxième chose était apparue. Elle était différente de la première certes, mais n’importe qui doté de vision aurait pu faire le lien entre les deux. Toutefois, comme personne n’était venu à l’école, la deuxième chose resta au centre de l’estrade de l’Agora jusqu’au lendemain matin. 

Le dimanche 3 décembre, une troisième chose apparut. Comme la deuxième chose était restée en place au centre de l’estrade, la troisième chose n’eut d’autre choix que de se placer à sa droite.  

Le lundi 4 décembre, élèves et professeurs passaient les portes de Rochebelle dans une mécanique bien rodée depuis le début de l’année pour commencer une autre semaine de torture. Une quatrième chose était apparue, cette fois-ci à la gauche de la deuxième, suggérant qu’elle soit arrivée en troisième place sur ce podium. L’incident du vendredi, oublié au cours des deux derniers jours de congé, refit surface avec la force d’un volcan. Les rumeurs, qui couraient auparavant avec la vitesse d’un cheval, allaient maintenant à une vitesse comparable à celle des vents d’un ouragan de force 5. Tous doutaient, se suspectaient. Même les moyennes des examens de ce lundi se révélèrent basses. Soudain, dans l’Agora, où on avait enlevé les trois plus récentes choses, un élève prononça une phrase qui changea tout : « Eh bien, c’est p’t’être un genre de calendrier de l’Avent. T’sais, on est en décembre et y’a eu une chose pour chaque jour à date. » Dès que le dernier mot franchit la barrière de ses lèvres, tout le monde adopta l’idée. Un calendrier de l’Avent, bien sûr! Pourquoi personne n’y avait pensé plus tôt? Dès la fin du midi, la nouvelle avait voyagé jusqu’aux confins de l’école et même jusqu’au PMR. Par contre, même si ce fait était établi, le mystère restait entier. Qui? Pourquoi? Comment? Tous attendaient le lendemain avec impatience.

Source de l’image liée à l’article: Photo de Blaz Photo sur Unsplash

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